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 Les contes de la chouette

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MessageSujet: Les contes de la chouette    Les contes de la chouette  EmptyJeu 30 Juin - 11:29

Les contes de la chouette furent écrits au début des années 1980. Ils auraient du être publiés, mais...
Vous avez ici la version originale...


Conte n°5

Cocu, battu, rôti !

« Mais où est donc cette garce ? » se demandait nerveusement le sieur Rousseau; en frappant son poing gauche dans la paume ouverte de sa main droite.
« Faut-il qu’elle ait le feu au cul pour laisser sa maison en tel état ! Et à qui va-t-elle montrer la voracité de son entrecuisse ? Pardieu, le beau mariage que j’ai conclu là ! Une catin, j’ai épousé une catin ! » Une fois encore, le chirurgien regarda à travers les carreaux de la fenêtre. Mais rien ni personne, dans la rue voisine, qui ressemblât, de près ou de loin à son épouse chérie.

Il y avait six ans maintenant que le sieur Rousseau avait épousé la belle Catherine Foliot, fille d’un riche vigneron des environs de Dijon. Et il l’avait connue de façon bizarre, pour ne point dire cocasse.
Alors carabin, il décida, par un bel après-midi de juin, de sécher les cours, et de partir en maraude. Plantant là livres et collègues, il sort par la porte d’Ouche, en direction des coteaux du Larrey, là où vigne pousse si bien. Et, quand on est courageux, c'est-à-dire jeune et en bonne forme, on remonte les rangs de « Montre-cul », on gagne la mi-colline. Et là, un panorama unique s’ouvre au regard. Toute la ville est là, devant vous. Et, entre vous et la capitale bourguignonne, les rives verdoyantes de l’Ouche, musardant là au milieu des prés.
Le jeune Rousseau contemple un long moment le panorama. Mais en juin; à flanc de colline, il fait très chaud, c’est un véritable cagnard ici, à la limite du crâ. Rousseau comprend que sa position va devenir intenable, et qu’il ferait mieux d’aller se baigner, dans un des nombreux trous que creuse la fantasque rivière. Chemin faisant, il croise quatre ou cinq journaliers venus travailler la vigne. Ces gens descendent d’un tombereau que conduit le « patron », reconnaissable à sa figure grasse, rougeaude, visiblement satisfaite de son sort. À ses côtés, assise à croupon, une jeune fille brune, aux yeux noirs et rieurs, fort bien de sa personne. Ce qui, aux yeux de l’étudiant, dénonce une personne aux rondeurs affirmées. Mais il n’y prête guère attention. Des belles filles, dame, par ici, il n’y a que l’embarras du choix ! Mais il est néanmoins vrai que quand on est jeune, sans sou vaillant, le moindre cotillon soyeux peut cacher Aphrodite.
L’étudiant parvient enfin à l’Ouche. Et, à l’abri d’un bouquet de frênes, se dévêt, puis se jette à l’eau. Mais il s’aperçoit un peu tard qu’il a gardé son caleçon. Et il n’en a qu’un. C’est dire que l’eau va dégouliner de partout quand il se relèvera. Qu’à cela ne tienne ! Son caleçon, il l’enlève, le tord, et le pose à plat, dans une clairière où filtre le chaud soleil. Aussi nu qu’à sa naissance, il retourne dans l’eau, s’ébattant gaiement. La vie est si belle quand on est quiet.
Une voix moqueuse le cloue soudain. Du coup, il en avale une tasse. Il se met debout, l’eau lui arrive au torse. Il se frotte les yeux rougis par son immersion inopinée. Et que voit-il ? La fille au cotillon soyeux qui l’observe, moqueuse :
« Le bel appareil que vous montrez là ! Mais peut-être a-t-il bu le bouillon, lui aussi ? Êtes-vous muet, l’ami ? N’avez-vous jamais vu femelles ? A moins que je ne vous plaise pas ! On se montre difficile, hein ! Et peut-être aussi que je dérange ? Ah ! Je vois ! Monsieur est nu, et monsieur a honte de se montrer nu ! que ne le disiez-vous ! Tenez, voilà pour vous rendre votre dignité, à défaut de votre virilité ! » Ce faisant, elle saisit le caleçon, le roule en boule, et le lance au milieu de la rivière. L’étudiant, pour l’aller chercher, est obligé de nager. Et donc de montrer à la donzelle ravie les rondeurs de ses maigres fesses. Pire ! Suprême humiliation ! il est obligé de se montrer en entier, de dos certes, mais en entier, pour enfiler le cache sexe, ou le cache-honte.
La donzelle rit de plus belle, et c’est rouge de confusion qu’il sort de l’eau, après avoir retraversé la rivière. Cette fois, l’eau dégouline le long de ses jambes. Et le tissu détrempé laisse facilement deviner l’organe de l’étudiant. Il lance, furieux :
« Vous n’avez que çà à faire ? Ennuyer les gens !
- Pauvre sot, vous êtes céans sur mes terres !
- La vigne ne vous suffit donc pas ?
- Non ! Mon père ignore le mot suffisance !
- Fille de bourgeois, hein ? cela se voit ! Et vicieuse avec çà !
- Vicieuse ? Vous déraisonnez, l’ami. J’ai des yeux, je regarde. Où est le vice là-dedans ?
- De regarder un homme nu !
- Mais fallait pas vous mettre nu, l’ami ! Qui l’a demandé ? Moi ? Non, alors ! Cela dit, je reconnais volontiers que vous êtes bien pourvu. Et le spectacle n’était pas inintéressant, loin s’en faut. Mais reste à savoir ce que vaut si bel appareil !
- Allez donc voir vos bourgeois, la donzelle ! Ils sauront peut-être vous apporter réponse !
- Mes bourgeois ? Quels bourgeois ? J’ai, certes, quelques flatteurs à mes pieds. Mais ils lorgnent plus volontiers sur la bourse de mon père. Tandis que moi, les voilà mes louis, dit-elle en pressant sa poitrine entre ses mains. Ce qui pour effet immédiat de faire remonter les seins, et de faire sauter les boutons du corselet. La fille s’en aperçut, éclata de rire, et dit : « Nous voilà à égalité, l’ami ! »
Pour le narguer un peu plus, elle prit soin de déboutonner le reste du corselet, puis son corsage qui, maintenant ouvert, laissait s’échapper deux belles mamelles que n’auraient onc reniées aucune des descebdantes d’Ève. Elle s’agenouilla, se pencha vers la rivière, remplit une de ses mains d’eau, et aspergea ses tétins, sans doute pour les rafraîchir.
« Ils ont beaux, n’est-ce pas ?
- Diable oui ! Ils sont beaux !
- Alors siffles, beau merle ! Ils ne sont pas pour toi ! »
Et tranquillement, reboutonna corsage et corselet. Puis partit d’un air détaché, en chantonnant une ritournelle à la mode, mais fort coquine dans le texte.
L’étudiant Rousseau enleva son caleçon, le tordit une nouvelle fois, se rhabilla, et prit le chemin du retour, à la fois honteux et ravi du spectacle offert.

Deux ans plus tard ! Son diplôme en poche, il épousait la fille Foliot, qui répondait au doux nom de Catherine. Mais, à l’inverse de sa sainte patronne, celle-ci se montrait doté d’un solide appétit. Au début, l’affaire n’était pas trop grave, car le jeune chirurgien, établi grâce à la dot de la fille Foliot, pouvait s’aménager quelques temps libres, faute d’une clientèle suffisante.
En fait, la clientèle se faisait attendre ; et hors quelque rares habitués, des voisins, on ne se bousculait guère chez le jeune praticien. Heureusement, il y avait le beau-père qui libérait sa bourse, et offrait quelques pièces de vin. Alors, en bon bourguignon, Rousseau se mit à boire. Tant d’ailleurs qu’il devint un véritable ivrogne. Et les répercussions de cet état se firent vite sentir. La clientèle déserta le cabinet, Rousseau eut des faiblesses sexuelles fréquentes. Et son épouse, dépitée, se réfugia dans les « bonnes œuvres ». Ce qui l’obligeait à quitter fréquemment son logis. Et donc Rousseau à boire davantage.
Un jour, pourtant, un de ses confrères, venu le voir pour un vague prétexte, fut retenu. On but beaucoup du vin apporté par ce cher beau-père. Alors, dans le cours de la conversation, le confrère, passablement aviné, révéla à l’infortuné Rousseau qu’il était heureux que les cocus ne portent pas de cornes.
« Pourquoi, demanda Rousseau prêt à s’esclaffer
- Vous auriez peine à passer sous la nef de Saint-Bénigne, mon ami !
- Qui ? Moi, tu plaisantes, j’espère !
- Hélas non ! Ta Catherine, elle a le con aussi large que la porte de Condé, pour le moins. Et y’a pas beaucoup de mâles qui n’aient visité sa fourche, dans Dijon. Tout lui fait ventre, à cette coquine. Bon ! Je te laisse là-dessus. À une prochaine, sans doute ! »
Un bon cocu est un cocu qui s’ignore, c’est entendu. Mais quand on apprend son infortune, il n’y a que deux solutions : on prend le parti d’en rire, en se disant que la vie est ainsi faite. Et qu’après tout, il n’y en eut jamais plus de deux par ménage. Et donc que... à charge de revanche.
L’autre solution consiste à se lamenter sur son sort. Et du choix de cette seconde solution naissent alors bien des drames dont se régalent les chroniqueurs des gazettes. Surtout de nos jours !
Rousseau s’apitoya sur son sort, exécra la mécréante, et derechef, avala le contenu de la cruche restée sur la table. Quand l’ardente Catherine regagna ses pénates, elle trouva son époux affalé sur la table, maugréant on ne sait trop quoi.
Elle le traîne donc jusqu’à son lit, le hisse. Et sans plus de manière, vaque à ses obligations ménagères. La bonne épouse ...

Le lendemain, dégrisé, Rousseau interpelle son épouse, et lui demande si ses œuvres caritatives ne lui prennent pas trop de temps, et ne l’épuisent pas.
« Mais non, mon ami ! Rassurez-vous ! Cela me détend, et me donne beaucoup de satisfaction ! », répond-t-elle d’un air narquois. Rousseau remarque que le corsage de sa Catherine se gonfle à ce mot.
« Mais qu’y faites-vous donc?, insiste-t-il
- Mon ami, comme si vous ne le saviez pas ! J’aide à soulager la misère des autres.
- Mais comment ?
- Comment çà, comment ?
- Que faites-vous pour les soulager ?
- Je leur donne autant que je peux !
- Et quoi donc ?
- Ce qu’il leur faut, ce qu’il leur manque le plus. Ce dont ils ont besoin !
- Votre cul, par exemple ? »
Stupéfaite, la fière Catherine se retourne, et regardant son époux droit dans les yeux, répond :
« Eh oui, mon ami ! Mon cul, par exemple ! Entre autres ! Il faut bien que quelqu’un s’en occupe. Je prends ailleurs ce que vous êtes incapable de m’apporter céans. Je suis jeune. On me courtise volontiers. Et un pal vigoureux n’a jamais tué personne. Mais ne vous plaignez pas. Je prends certaines précautions. Et vous n’aurez point de bâtard à qui léguer votre nom.
- Vous n’êtes...
- Qu’une catin, n’est-ce pas ? Vous manquez d’imagination, mon époux. Et aussi de tolérance. Cessez donc de vous aviner, culbutez-moi comme avant, et peut-être vous reviendrais-je !
- Vous n’êtes...
- Je sais ! Cessez de rabâcher ! Et ouvrez donc votre pantalon. Croyez-vous que cette chiffe qui pend entre vos jambes suffise à me complaire ? Mon pauvre ami ! N’importe quel godelureau de quinze ans est mieux pourvu que vous. Et me monte beaucoup mieux ! Allons ! Ne faîtes pas cette tête. Vous êtes cocu ? Votre honneur est mis à mal ? Mais où est-il, cet honneur ? Que faites-vous pour l’entretien de cette maison ? Rien ! Si vous mangez à votre faim, c’est à la fortune de mon père que vous le devez.
- Ma clientèle ...
- Votre clientèle ? Allons donc ! Celle que vous n’avez pas achevée s’est enfuie chez d’autres praticiens plus compétents. Mon pauvre ami, vous n’étiez qu’un gueux avant que vous m’ayez prise pour épouse. Restez donc ce que vous êtes, un gueux, et rien de plus ! Buvez autant que vous sied, et laissez-moi vivre. Vous êtes cocu ? La belle affaire ! Pensez-vous donc avoir lancé la mode ? Non, n’est-ce pas ! Croyez-m’en, vous ne l’enterrerez pas non plus, elle au moins ! Voyez donc vos confrères. Lequel d’entre eux n’est pas cocu, je vous le demande ? Cela ne les empêche pourtant pas d’exercer. Faites comme eux ! Contre mauvaise fortune bon cœur ! Et rien ne vous empêche de me rendre la pareille si vous en êtes capable. Mais j’en doute fort ! Et, à moins d’un miracle, il y a peu de chances pour que vos bourses se vident en con accueillant...
- Vous auriez au moins...
- Vous en demander permis ? Mon cher, nous sommes en 1660, que diable ! La femme a des droits, elle aussi. Et en particulier celui de se faire monter par qui lui complaît.
- Madame, l’adultère est un crime !
- Rousseau, mon bon Rousseau, nous sommes à Dijon. Pas au Louvre ! Et pour être condamnée en adultère, il faut que constat soit établi, en présence du procureur royal, ou sur son ordre. Or, le procureur est précisément de mes amants en titre.
- Madame, je le vois bien : je n’aurai pas le dernier mot !
- Vous ne l’avez jamais eu, Monsieur. Puis-je vous le faire remarquer ?
- En tous cas, je vous exhorte à reprendre le droit chemin !
- ....
- Et à retrouver présentement une conduite qui sied à votre rang !
- Mon rang ? Sachez, mon ami, que je le prépare à l’heure présente..
- Qu’est-ce à dire, Madame ?
- Avec votre tenue actuelle, je serai bientôt veuve, Monsieur ! Et bien des galants attendent pour convoler.
- Vous n’êtes qu’une ...
- Catin. Vous l’avez déjà dit. Vous vous répétez, mon ami. Je suis une catin ! Pensez-le, si tel est votre désir. Mais une catin de choix qui sera bientôt honorée de la bourgeoisie. Et qui apportera sans doute quelques quartiers de noblesse à sa famille.
- Madame, vous avez de l’ambition ! Mais à péter plus haut que nature n’a attaché votre cul, vous finirez par vous casser les dents.
- Peut-être, Monsieur, peut-être ! Mais il se trouve que ce cul plaît, qu’il sait se montrer accueillant. Et vous êtes bien sot et bien ingrat de ne pas en profiter. Sur ce, monsieur, je vous laisse à votre occupation favorite. Je me rends à mes affaires ! »
Rousseau, abasourdi, la regarde partir. Il n’a même pas la force ou le courage de lui interdire la porte. Elle s’en va, fière, certaine de ses charmes conquérants, sans même un regard pour son époux effondré.
Une heure se passe. Rousseau, la tête pleine des impertinences de sa femme, n’a pas bougé. Il est atterré. Et se convainc tout de même que toute cette situation découle de ses incapacités. Il s’est montré incapable d’exercer son art, incapable de se plier aux exigences de la bienséance locale, incapable même d’engrosser sa Catherine, incapable de jugement, et incapable d’asseoir son nom et son autorité. Il n’est qu’un gueux, sa femme vient de le dire. Mais un gueux faible et mou, trop heureux d’avoir épousé une petite bourgeoise paysanne. Et la bourgeoise paysanne, devenue petite bourgeoise citadine, aspire à devenir grande bourgeoise, en attendant mieux. Et ce mieux, lui, Rousseau, est bien incapable de le lui offrir.
Il se lève, va chercher une cruche de vin, et la vide d’un trait. Le vin du beau-père se montrant de bon conseil, il résolut de mettre fin à ses jours. Ainsi, sa Catherine aura champ libre pour manœuvrer à sa guise. Oui, se tuer, voilà la solution ! Partir dans un ultime geste de courage, en beauté. En homme, quoi ! Persuadé que sa Catherine mourrait à son tour, rongée par le chagrin et le remords.
La résolution est prise. Reste à savoir comment se supprimer !
La pendaison ? Non ! Rousseau est chirurgien, et sait que les derniers instants sont horribles. Et puis, on pend un voleur, pas un cœur.
Le fusil ? Allons donc ! Il n’a pas le bras assez long pour appuyer sur la gâchette. De plus, la tête éclatée, cela fait sale, franchement désordre. Surtout dans la demeure d’un chirurgien. Et puis le sang, c’est grandiose sur un champ de bataille, pas dans un appartement.
Le couteau ? Non ! Rousseau serait capable de se rater, et de se soigner. Offrant alors à Catherine un nouveau prétexte de le porter au pinacle du ridicule.
Non, Rousseau veut une belle mort. Une mort qui laisse des traces, tout en restant propre. Pour cela, il n’y a que le feu. Oui, le feu, c’est çà ! Rousseau doit s’immoler par le feu ! Une mort à la Jeanne d’Arc, spectaculaire à souhait, mais qu’il se serait lui-même donnée.
Le choix est fait. Reste à passer à l’acte. Une dernière cruche de vin, histoire de ne pas partir avec trop de regrets. Et on entasse pêle-mêle ce qui flambe aisément, le tout arrosé d’alcool. On bat le briquet, et la grillade démarre.
Un peu à l’écart, Rousseau attend que l’incendie prenne de l’ampleur, et se propage. Dame ! On a bien le temps de mourir, non ? Une dernière rasade d’alcool, non sur les flammes, mais dans l’estomac.
Mais quel est donc ce bruit ? On dirait que quelqu’un frappe à la porte. Rousseau ouvre la fenêtre, ce qui pour effet immédiat d’activer les flammes, et penche sa tête sur la rue.
« Qu’est-ce ? demande-t-il d’une vois pâteuse
- Rousseau, répond un bonhomme enlevant la tête, sauvez-vous vite. Il y a le feu chez vous !
- Pardi ! Je le sais bien. C’est moi qui l’ai allumé !
- Mais vous êtes fou ! tout le quartier risque de brûler avant que les secours s’organisent..
- Et alors ! Vous reconstruirez !
- Rousseau, en tant qu’échevin, je vous somme d’ouvrir votre porte, afin qu’on puise étouffer cet incendie.
- Échevin, en tant que citoyen, je suis maître chez moi. Et vous somme de cesser là toutes vos importunités ! »
Et Rousseau referme la fenêtre. L’incendie a maintenant gagné le couloir, et progresse vers la pièce où se tient notre homme. En bas, le sieur Louis; commissaire aux comptes du parlement; tambourine de plus belle, et hurle. Dehors, la foule s’amasse, et Rousseau aperçoit des sergents de ville accourir avec une hache. Dans le but évident de briser la porte.
Alors, Rousseau a une idée. Puisque tout vient de sa femme, et que sa femme fréquente la bourgeoisie représentée ici par ce sieur Louis, il va s’en venger. Il saisit un mousquet, le bourre, enfonce la balle, ouvre sa fenêtre, vise le sieur Louis, et bat le briquet. L’édile roule sur l’assistance voisine. Déjà, les flammes lèchent les murs du salon. Rousseau est un assassin, un double criminel : incendiaire et meurtrier. S’il en réchappe, le Morimond lui est promis, il n’y a aucun doute. Alors, une ultime rasade d’alcool, et il entre dans les flammes. Le cocu est rôti...

Mais l’histoire ne s’arrête pas là.
En revenant chez elle, la belle Catherine subit les invectives de la foule. Et on dut même la protéger pour l’emmener chez une notabilité de ses connaissances. L’incendie dura toute la nuit. Au petit matin de ce 20 avril 1660, la foule dijonnaise s’agglutine devant les ruines de la maison Rousseau. Le guet est débordé. La foule se rue sur les décombres, et cherche trace du sieur Rousseau.
Elle ne le trouva que trois jours plus tard, le jour même où l’échevin Louis rendit l’âme. La foule, un peu calmée durant l’intervalle, redouble alors de fureur.
Du cadavre, il ne restait pas grand-chose. Un squelette, quelques morceaux de chair calcinée. Peu de choses, vous dis-je. Mais suffisamment pour calmer la colère du quartier Saint-Bénigne. Les restes du sieur Rousseau furent posés sur une claie. On brisa les os ; et cet amas informe, on le jeta dans un brasier allumé au Morimond.

Cocu, battu, rôti, tel fut le sort du sieur Rousseau, chirurgien de son état, et époux malheureux de Catherine Foliot la bien aimante.
Laquelle dut partir quelques mois de Dijon, mais revint deux ans après pour y épouser le fils d’un célèbre président à mortier. Elle eut droit, quelques mois plus tard, au port de la particule. Mais il faut reconnaître qu’elle s’était acheté une conduite. Dame, elle avait visité tous les lits de la capitale bourguignonne, à la recherche de cette fameuse particule. Long, mais fructueux. Pénible ? N'exagérons pas !

Cela se passait le 20 avril 1660, à Dijon, rue Condorcet.

Folette

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Les contes de la chouette

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